jeudi 14 décembre 2017

Depuis qu’il m’a quitté, j’ai froid / A quand des médicaments pour guérir d’une rupture ?

Une semaine de rupture. Et j’ai l’impression d’aller de plus en plus mal, et d’être incapable de raisonner.

Mes collègues me regardent de loin, circonspects, comme une bombe à retardement.
Plus personne n’ose me demander « ça va ? » : Ils ont vite compris que, non, ça va pas, et qu’en plus la question provoque un raz de marée.
Certes, j’ai tendance à sangloter sans prévenir, et je me traine dans les couloirs comme une âme en peine, dans les mêmes fringues que la veille.
Ou l’avant-veille.
Ou même plus tard que ça ?
Je ne sais plus quand j’ai changé de fringues pour la dernière fois.
Si ça continu, je vais devenir une sorte de monstre-mascotte au boulot. Ptetre même que c'est déjà le cas ?!


Une collègue m’a apporté un paquet de chamallow « Quand tu as envie de pleurer, prends en un. Tu pleureras peut-être quand même, mais ce sera un réconfort ».
J’avoue, c’est un petit réconfort c’est vrai.
Je mange peu, je me force. Ça, c’est hyper révélateur ; j’adore manger, et quand je vais mal, vraiment mal, c’est *ce* plaisir-là qui trinque en premier. (D’ailleurs perso, quand mes copines vont mal, j’ai tendance à penser directement « Attends bouge pas, je te fais un truc bon à manger ! ». Nourriture = plaisir = bonheur). Là pour l’instant, manger est un calvaire, et je me nourris presque exclusivement de soupes (« Au moins il y a des légumes et des vitamines »). J’ai craqué il y a quelques jours, presque rageusement : « Je veux des frites. Des frites et de la sauce ». Copine#1, ravie, pensant voir un sursaut de dynamisme secouer ma carcasse, m’a emmené manger des frites.
Sauf que comme je ne mange quasi rien depuis une semaine, bah évidement : ça m’a retourné l’estomac, et j’ai cru mourir sur mes toilettes, chiant tripes et boyaux.
Copine#1, pragmatique, m’a dit « L’avantage, c’est qu’une douleur en chasse une autre ».

Mais je flippe un peu : une alimentation anarchique, pas de sport, un arrêt médical d’un mois pour guérir de ma foulure…
A quoi je vais ressembler moi, quand il sera temps de reprendre ma vie en main ?!

J’essaie de limiter mes angoisses.
Pour la réunion de l’Asso, qui avait lieu 4 jour après notre rupture, je me suis évidement défilé. A la place, j'ai été manger (et pleurer) chez Copine#3, sur sa suggestion, en essayant de ne pas culpabiliser d'être là, à pleurer chez elle et à la noyer sous mon imbécile de tristesse, elle qui attend son premier enfant (ce qui me terrorise, tout à fait entre nous). J'avais prévenu en priorité le Trésorier, pour qu’il annule le repas prévu pour moi le plus vite possible, afin que ça ne foute pas la merde dans les comptes de l’Asso.
Et puis une part de moi avait l’impression de lui faire une fleur : Tu peux te sentir vengé, petit cœur, tout est fini et j'ai le cœur en miettes.
Je n’ai pas eu le courage de prévenir le Président (notamment parce que je le vois comme une personne parfaitement dénuée d’empathie… Ou même d’un cœur). Mais le Trésorier « s’est permis de l’appeler pour lui en toucher un mot, ne te tracasse pas ».
Soulagement.
Puis de nouveau angoisse : et l’Asso ? Et les affaires de Charles-Henri ? Et… Et… ?
Alors j’ai écrit à Président, pour savoir s’il était dispo vendredi.
Qui ne m’a pas répondu – et là j’ai sombré dans des abysses de paranoïa « Tout le monde me hait, plus personne ne veut me parler, je suis devenu une paria ».
J’ai réécrit à Président, suppliante « Je ne t’embêterai pas longtemps ».
J’ai juste besoin de lui balancer les affaires de Charles-Henri, qui me torturent.
Son tee-shirt où flotte son odeur – Pourquoi son odeur continue-t-elle de me sembler rassurante ?! Pourquoi ? C’est stupide, tellement stupide. J’ai presque peur de me séparer de son tee-shirt. Et son caleçon qui sent le sexe, ce qu’on ne fera plus jamais ensemble.
Cette boîte de capotes qu’il a laissé chez moi – reprends les, Perfect Boy, tu en auras besoin bien avant moi, je suis prête à prendre les paris !

Président m’a répondu. Président était juste ultraoverbooké, comme d’hab. Il m’a dit de passer. Il m’a imposé de rester manger chez lui, avec son mec. Qu’il y aura de quoi pleurer, parler, se goinfrer de glace et de chocolat. Que là, j’ai besoin de ça, et de mes amis, et de parler, et de prendre le temps.
Peut-être qu’en fait il a grave de l’empathie et un cœur, en fait.
(Dingue).

Depuis qu’il m’a quitté, j’ai froid. Tout le temps. Je tremble de froid, je claque des dents, à longueur de nuits et de jours.
Je ne suis même pas sûre que c’est mon corps qui a froid – c’est dedans : je suis frigorifiée de l’intérieur, et impossible de réchauffer ma peau.
Je ne me l’explique pas.
Ma minette est scotchée à moi, déjà toute chafouine de voir des cartons partout chez nous (quand je commence à en faire, elle se met dans un autre, un petit à sa taille, et me regarde, en attendant, comme pour dire « Hé, tu me prends aussi hein ? »). Mais si ça me fait du bien, de pouvoir coller mon visage dans son pelage et écouter son ronron, j'ai toujours froid, si froid...
Cette nuit j’en ai eu marre de grelotter. J’ai recouvert mon lit de plaid, je me suis enterré sous les couvertures.
Et enfin, j’ai passé une nuit sans trembler, pendant que dehors, une tempête faisait rage, giflant mes volets, secouant mes fenêtres, et que dans un demi-sommeil, je me disais « c’est exactement ce que je ressens ». 

J’ai été voir un médecin, pour me faire prescrire de quoi réussir à me lever le matin, et tenir debout sans craquer. Sur conseil de Copine#2 (et vu que je ne veux plus aller voir mon médecin habituel), j’ai choisi un homéopathe « ça sera plus naturel, et demande bien un truc sans dépendance ! ».
Je suis arrivée dans un cabinet qui sentait les vieilles personnes – et un peu l’odeur de chez mes grands-parents, ce que j’ai trouvé très apaisant. La salle d’attente ressemblait à un salon, il y avait une cheminée, une grande bibliothèque, des coloquintes peintes. C’était chaleureux.
Un vieux Monsieur est venu me voir – genre très très vieux, tout petit et tout ridé. Je me suis dit « Mec, tu as grave passé l’âge de la retraite depuis une décennie ou deux, qu’est-ce que tu fais encore là ?! »
Mais comme c’était lundi, a.k.a mon deuxième jour de week-end, et que j’avais passé plus ou moins 48h non-stop à pleurer, j’ai juste réussi à gargariser un bonjour.
Il a voulu faire un dossier, et là je me suis aperçu que cet homme, très gentil au demeurant, était sourd comme un pot. Il a voulu savoir ce qui m’amenait, puis il a voulu savoir l’histoire en détail. J’ai donc dû hurler mon histoire dans sa petite oreille fripée : que j’étais triste à crever, que je pensais avoir trouvé l’homme de ma vie alors que non, que je pensais finir ma vie seule, que j’avais une peur bleue de finir seule, et de ne jamais avoir d’enfants.
Oui, ça y est, je l’admets, après des années à être odieuse à propos du concept d’enfants, j’ai réalisé au contact de Charles-Henri que j’avais envie d’en avoir. Envie d’être enceinte, envie (d’essayer) de transmettre mes valeurs à des êtres en devenir, envie de, peut-être, apporter de belles personnes dans ce monde.
De temps en temps, mon Professeur Tournesol lançait des « C’est vrai que c’est un peu brutal », et autre « Vous avez déjà vécu ça ? ». Ou encore « Vous ressentez de la colère ? ». (Non, mec : je suis une limace tentant de fusionner avec son lit et/ou une couverture, je suis tristesse et sanglots, pas colère). Et parfois il se répétait. Puis rentrait dans un silence songeur, fixant les notes qu’il avait prises en fronçant très fort les sourcils.
Ça a duré une heure, à crier mon histoire en pleurant (Mon Dieu que je me sentais seule, et que cette situation était surréaliste), et à le regarder froncer les sourcils.
C’était épuisant, et j’avais envie de lui dire « Ne cherchez pas de solutions, Maitre Yod…Professeur Tourn… Docteur. Il n’y en a pas ! Et je le sais bien ! Il n’y a rien à faire ! Il est partie, je me suis cassée la gueule, vous n’aurez pas de solutions ! A moins que vous soyez *aussi* Marabout et que vous pratiquiez le rituel du « retour de l’être aimé », mais vous êtes plus blanc que mon cul au plus froid de l’hiver, alors j’ai un peu du mal à y croire ». (Bien que le cabinet arborait également une plaque d’acupuncteur, alors allez savoir… Ce que j’ai d’ailleurs personnellement trouvé très flippant, vu l’âge du médecin)
Au bout d’un moment, j’ai reformulé ma demande de base, à savoir : « J’ai juste besoin de quelque chose qui m’aide à me lever le matin, et qui me fasse tenir une semaine, jusqu’à mes vacances ».
« Vous voulez un arrêt de travail ? »
« Surtout pas. Je n’aurais plus aucune raisons de sortir de mon lit »
Il a fini par me faire une ordonnance longue comme mon bras, mais je crois que j’ai trouvé rassurant d’avaler plein de médicaments. Moi, qui normalement n’en prends jamais.
Il m’a également fait une attestation pour l’arrêt du sport, puisqu’avec mon pied, je ne suis absolument pas capable d’assurer un cours. Même si ça m’aiderait tellement, tellement, TELLEMENT.
Le soir, j’ai pris deux cachets de son calmant, pour dormir sereinement. Que j’ai pris avec des anti-inflammatoires pour mon pied, et un cachet pour dormir.
Et là, ça a été genre le feu d’artifice : c’était comme si j’étais réveillée dans mon sommeil. Réveillée et ultra euphorique. Je me suis cru une Spice Girl. J’ai eu un orgasme sans même me toucher. J’ai pas arrêté de me dire « En fait ça va trop trop bien !! ».
Je me suis réveillée crevée le lendemain matin. Totalement flippée de reprendre ce truc.
Et en fait, je n’allais pas mieux du tout.

Depuis, j’en ai repris (et je n’ai pas pété les plombs).
Est-ce que je me sens mieux ? Je ne suis pas certaine. Je n’ai plus refait de crises d’angoisse comme le soir de la rupture, mais je ne me sens pas pour autant plus sereine – mais j’imagine que c’est à moi, de retrouver ma sérénité par moi-même, n’est-ce pas ?

Bref, je ne suis pas convaincue que ça valait la peine de claquer 40 balles chez un médecin non conventionné ; le médicament contre les cœurs brisés n’existe pas encore. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire