mardi 5 décembre 2017

Week-end à l’hôpital avec Charles-Henri


A la base, avant de nous voir à l’improviste vendredi soir, Charles-Henri et moi devions passer un petit bout de week-end ensemble. Mais comme le week-end précédent, il fallait se débrouiller avec nos emplois du temps respectifs, puisqu'il faisait 48h de Garde.
Cette fois, nous avions un planning inédit : je le rejoignais vers 17h à l’hôpital, car oui Mesdames et Messieurs, les Internes et autres médecins de garde ont une chambre, et peuvent y recevoir leurs conjoints pendant leur garde.
Je me suis immédiatement imaginé à la place d'un patient hospitalisé, qui attend, angoissé, son médecin de garde, pendant que celui-ci est en pleine séance de jambes en l’air. Ce qui est donc une foutue réalité (car oui, spoiler : on a fait l’amour à l’hôpital)
Il ne faudrait jamais connaitre les dessous de l’organisation d’un hôpital, tout comme il ne faut jamais voir les cuisines d’un restaurant.


L’idée, si je la trouvais amusante, me laissait quand même un peu effrayée : D’une part, j’ai peur des hôpitaux. D’autre part, la dernière fois que j’y ai passé la nuit, c’était en janvier de cette année et  c’était parce que mon petit frère s’était fait renverser par une voiture. La fois précédente, c’était il y a quelques années, quand j’ai été intoxiqué au monoxyde de carbone parce que mon propriétaire m’avait loué un appart où la chaudière était défectueuse : j’ai passé une nuit sous oxygène aux urgences, et c’était pas super fun, surtout que mon ex avait jugé que ce n’était pas assez grave pour qu’il quitte la soirée qu’il passait avec ses potes.
Bref, mes expériences tendaient à rendre cette expérience psychologiquement inconfortable.

Nous avions prévu que j’arriverai en train le dimanche soir, et que nous repartirions ensemble avec sa voiture le lundi matin.
J’ai donc pris le train, puis marché sous la pluie jusqu’à l’hôpital. Arrivée à l’entrée des Urgences Gynécologiques, je l’ai appelé. Il est venu me chercher, visiblement tout foufou de me voir. Il devait partir en césarienne [sic] 20 min plus tard, ce qui nous laissait le temps d’aller jusqu’à sa chambre. J’ai réalisé, comme à chaque fois que je mets les pieds dans un hôpital, que c’est des fichus bâtiments gigantesques, avec de véritables dédales en guise de couloirs. Nous avons marchés 5 bonnes minutes, avant d’arriver à « l’hébergement du personnel ». Il m’a emmené dans sa chambre, qui valait bien une chambre d’hôtel bas de gamme : il y a juste ce qu’il faut, c’est propre, suffisamment confortable, avec une salle de douche et un wc… Et assez peu insonorisé.

Charles-Henri était complètement foufifou « C’est un peu comme si on était à l’hôtel ! On pourrait même dire que c’est genre notre première fois à l’hôtel ! ».
Oui, bon…. C’est difficile de faire comme si, tout de même. Notamment parce que, mon chéri, tu es habillé avec ces affreuses tenues vertes de bloc opératoire. Et que ta peau sens la Bétadine.
Ensuite il s’est senti obligé de me raconter exactement comment on fait une césarienne, en me montrant sur mon ventre où il allait inciser d’ici une dizaine de minutes.
[Je me suis sentie devenir soudainement moite et très pâle. C’était pas marrant du tout comme conversation. Mais lui était visiblement très fier de lui]
Il est donc parti en intervention, et moi je me suis installé tranquillement avec un livre et un peu de musique. Il est revenu environ 1h30 plus tard, et j’ai proposé qu’on mange : j’avais apporté un repas pour nous deux, car de toute façon, c'était absolument hors de question que je mange de la bouffe d’hôpital. Je lui ai demandé d'aller faire réchauffer ce que j'avais apporté, et pendant ce temps j’ai rangé le bordel monstrueux qu’il avait réussi, en 24h, à étaler dans la chambre :
Une pile de fringues sur le bureau, mélange de propre et de sale
Un sac
Des livres de médecine
Une autre pile de vêtements un peu plus loin (propre ou sale ?)
Ses précédentes tenues de travail, en boule
Son manteau, en boule en dessous
Etc etc
J’ai donc mis son manteau sur un cintre dans le placard, en grommelant « Mais c’est quand même incroyable, c’est pas compliqué à faire, bordel ! », puis j’ai plié et rangé ses vêtement dans l’étagère du placard, où il y avait la place d'installer les affaires d’une colonie de scouts au grand complet.
Quand Charles-Henri est revenu, toujours foufifou, il s’est exclamée, heureux « Ah ben ça se voit que tu es une fille, moi j’aurais JA-MAIS eu l’idée de mettre mes fringues dans un placard à fringues. C’est un truc, je crois que c’est hors de portée de l’esprit d’un homme ! ».
Voilà qui est rassurant.

Là il m’annonce que, dans la salle de pause à côté, il y a l’infirmière que j’avais détestée lors d’une des soirée chez le Président de l’Asso. (Mon Dieu, la ″Santé Pu’ ″ est vraiment un monde épouvantablement petit) Je rétorque donc « Bah c’est pas grave, elle n’est pas censée savoir que je suis là, non ? »
Sauf qu'en fait, il pensait naïvement manger avec tout le monde en salle de pause, ce que je n’envisageais pour ma part ABSOLUMENT PAS. Déjà parce que, je connais le truc : dans les salles de pauses, tout le monde parle boulot. Merci, mais non merci, d’autant plus que si c’est pour parler de trucs dégueu sanguinolents, moi j’ai pas la formation qui va avec et j’ai l’estomac fragile. Ensuite, j’entendais depuis un moment un nombre difficilement quantifiable de gonzesses qui parlaient (trop) fort non loin de moi, et je ne me voyais pas du tout me retrouver dans la même pièce. En plus je ne faisais clairement pas partie du même monde, et je ne me sentais pas super à l’aise de passer la nuit avec Charles-Henri, même si visiblement « ça se fait souvent ». Et la présence de la grande gueule en chef, l’infirmière vulgaire, ne faisait qu’achever de me convaincre que je ne sortirai pas de la chambre sans y être obligée.
Ce que je n’ai absolument pas dit en ces termes, évidement. J’ai plutôt avancé candidement « Ah ? Je pensais qu’on mangeait ici, j’ai tout débarrassé exprès pour ça ! ».
Donc nous avons mangé dans la chambre, et c’était très bien comme ça.

Ensuite Charles-Henri a voulu me caresser, avec l’objectif de me faire jouir, car il « avait une dette ».
Moui.
Bon.
Dans l’absolu je n’étais pas contre, mais, bizarrement, j’avais la tête ailleurs, genre à me dire : 
Ces chambres ne sont pas du tout insonorisées.
Le téléphone peut sonner à tout moment pour l’appeler pour une urgence – et si je suis au bord de l’orgasme, il se passe quoi ?!
Il y a des gens tout autour.
On est dans un hôpital.
Etc etc.
Donc j’étais pas super à l’aise. Et quand ça a commencé à être vraiment agréable pour moi, je lui ai dit d’arrêter, parce que j’avais peur de faire du bruit. De toute façon, je pense sincèrement que je me serais bloquée.

Nous nous sommes caressés encore un peu, puis il a dû partir vérifier je ne sais quoi. Il m’a dit « Tu restes nue, hein ? » en saisissant mes vêtements, et j’ai ri « Ou sinon quoi ? Tu pars avec mes fringues pour être sûr ?! »
Je suis restée nue.
Il est de nouveau parti un peu plus d’une heure. J’ai fini mon livre, et j’ai un peu joué sur mon téléphone. Je commençais à somnoler lorsqu’il est revenu. Il devait être 23h. On a mangé le dessert et bu du thé, avant de se coucher. Il s’est collé contre moi, son nez entre mes omoplates « J’adore l’odeur de ta peau ». On a fait l’amour, le plus silencieusement possible. Quand on a eu fini, il a pris une douche « Je ne peux pas repartir dans le service avec une odeur de sexe qui me colle à la peau ! ». Et puis d’ajouter très vite « J’aime cette odeur sur toi hein ». Mais je comprenais tout à fait que, bon, en tant que médecin de garde aux Urgences Gynéco, débouler en puant le sexe, c’était pas super professionnel.
Je me suis demandé si certains médecins se prenaient autant la tête que lui.
Je me suis dit que ces « quartiers » étaient quand même potentiellement de parfaits baisodromes. Tu m’étonnes que les médecins peuvent avoir la réputation de s’envoyer des infirmières : n’importe qui ici peut s’envoyer en l’air sans que personne n’y voit rien.
N’y pensons pas.

Nous nous sommes endormi. Il a été appelé vers 2h pour une urgence. Je me suis rendormie. Puis de nouveau vers 4h, et il m’expliqua le lendemain qu’il s'est absenté plus de 2h – ce que je n’ai absolument pas vu passer, parce que je dormais profondément.
Il est ensuite reparti vers 7h30 pour faire les transmissions. Il m’a demandé d’être prête pour 8h30.
Je me suis levée tranquillou vers 8h, j’ai pris le temps de prendre une douche, de ranger la chambre, de refaire le lit (en ricanant dans ma tête que c’est surement pas Charles-Henri qui doit avoir l’habitude de faire ça). J’étais prête à 8h30, et je me suis posée avec un (nouveau) livre en attendant.
Il est arrivé une dizaine de minutes plus tard, rayonnant : « Allez, on s’arrache ! »
On est parti, direction chez moi pour un petit dej à deux. J’ai voulu passer à la Banque avant, pour demander des explications – sur son conseil, et c’était une bonne idée – mais ça a été désastreux. J’étais donc particulièrement morose.
Après le petit dèj, on s’est posé au chaud dans mon lit, chacun avec un livre. Et… 1h plus tard, je me réveillais. Nous nous étions tous les deux effondrés, visage contre visage, nos livres abandonnés entre nos doigts.
Je me suis levée silencieusement, laissant Charles-Henri se reposer. J’ai vaqué à mes occupations, jusqu’à ce que mon chat, qui a un 6e sens pour ça, se précipite dans la chambre : je savais que Charles-Henri était en train de se réveiller. Je l’ai donc rejoint, et couvert de baisers. Il grommelait « Me laisse pas dormir, faut qu’on profite d’être ensemble », et je l’ai engueulé « Tu sors de 48h de garde. Tu es fatigué bon sang. Tu sais que je le comprends ? Repose-toi. Tu as faim ? Je vais faire à manger. Dors encore. ».
Pendant qu’il se rendormait, j’improvisais un déjeuner. Je surveillais l’heure en même temps, parce que j’étais censée recevoir vers 14h30 ma nouvelle copine médecin, dont je garde les chats (et dont le mec est hospitalisé pour unesévère dépression). Appelons là Sharon. J’ai finalement demandée à Sharon d’arriver une heure plus tard, en lui expliquant que j’avais un Charles-Henri mort et affamé dans mon lit – de toute façon il faudrait bien à un moment que je lui avoue notre relation (à elle, et puis à tous les autres).
J’ai réveillé Charles-Henri pour qu’il vienne manger, et il était de nouveau foufou « Oh, c’est joli ! Ya plein de couleurs ! Oh, c’est bon ! ».
Puis quand on a eu fini, il m’a enlevé mon pantalon, et nous repartions dans la chambre. On surveillait l’heure, pour ne pas nous faire surprendre par Sharon, mais je sentais qu’il n’avait pas envie de partir. Il était censé partir après le petit dej, parce qu’il avait plein de choses à faire, mais là, à 15h30, il n’avait clairement pas du tout envie de partir.
Finalement, il est parti en trainant les pieds, quasi en même temps que Sharon arrivait.
Sharon qui était évidemment surexcité : « Je le SAVAIS que vous fricotiez ensemble ! J’en étais SURE ! Ça fait combien de temps ?! Oh je suis super contente ! C’est trop bien ! Raconte-moi tout ! Ah ah, je l’avais dit à mon mec qu’il y avait un truc louche entre vous deux, j’avais raison ! Bon, alors, ça fait combien de temps ?! »
Du coup j’étais censé lui remonter le moral et l’écouter concernant les problèmes dépressifs de son mec, et j’ai passé plus de temps à lui raconter notre histoire. Mais visiblement, ça lui a changé les idées, et c’était le but !
D’ailleurs elle était à fond, à dire « Mais c’est TROP BIEN, on va pouvoir se voir tous les 4, et un peu plus souvent ! Mais c’est génial ! En plus c’est trop cool, moi je t’adore, ça va être fun ».
Bon, je me suis demandé à quel point ma relation avec Charles Henri m’ouvrait les portes de son amitié enthousiaste, mais ne soyons pas trop suspicieux.
Elle a par la suite proposé de m’emmener à son cours de Crossfit, ce que j’ai fait bien volontiers, sachant que je n’avais pas été au sport ce jour-là.

Le soir, j’ai appelé Charles-Henri pour lui raconter, et lui donner des infos sur l’état de santé de son ami. Je lui ai dit aussi qu’on attendait qu’il nous donne ses dates de Garde pour prévoir des trucs tous les 4.
On est resté très longtemps au téléphone. Lui qui m’avait dit une fois n’être pas un fou des conversations longues, puis des soupirs silencieux au téléphone, je le sentais réticent à raccrocher. Comme cette après-midi, je sentais qu’il n’avait pas envie qu’on se sépare. J’ai adoré ce sentiment. Je le sentais tout câlin, tout proche, tout affectionné. Ca faisait battre mon cœur plus fort.

Je me suis dit que j’avais hâte de le revoir.

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