mardi 20 mars 2018

J'ai trente ans, et je me demande si je serais heureuse, un jour

Copine #3 va avoir un bébé.
Copine#2 a rencontré son mec au lycée, et ils vivent ensembles depuis plus de dix ans, une relation entière et magnifique, où ils sont tout l’un pour l’autre.
Copine#1 envisage de s’installer avec son mec, lorsqu’il reviendra de Paris, elle qui était anti-couple, anti-fidélité, anti-vie de couple, polyamoureuse et séductrice invétéré. Elle qui était anti-enfants, mais qui est prise de vomissements incontrôlables depuis quelques jours, et qui se demande si elle n’est pas enceinte, parce qu’elle a pris sa pilule en retard.
Sharon m’a montré sa bague de fiançailles : « Teddy m’a demandé en mariage il y a 3 jours ! ». [Moment pénible qui n'est pas étranger à l'écriture de cet article déprimant, que j'ai écrit le lendemain]
Ma meilleure amie Violaine est en couple depuis 2 ans, ils ont achetés, ils se sont pacsés. D’ailleurs, on s’est beaucoup éloignées depuis qu’elle vit un bonheur sans nuages. Je m’attends à tout moment à ce qu’elle me dise « On va avoir un bébé ! ».


Je suis la plus âgée de mes amies, et je suis celle qui est seule, qui, sentimentalement, est au point mort.
Aujourd’hui je ne me sens même plus capable de laisser une place à quelqu’un dans ma vie, d’accorder ma confiance. Je suis exaspérée par ceux qui me disent « Tu le sauras, quand tu auras trouvé le bon ! ». Parce que je n’y crois pas, parce que je pensais avoir trouvé le bon, parce que mes erreurs de jugement vont juste devenir légendaires. Je suis trop sensible, trop naïve, trop incapable de comprendre le monde qui m’entoure. Et les hommes qui tentent d’être séducteurs avec moi, je le vis comme une véritable agression.
Laissez-moi, laissez-moi tranquille. Allez mentir ailleurs.
[Article à venir]

Je regarde des séries TV, et s’il y a un couple qui se forme, un mariage, ou un bébé qui nait, je pleurs.
Et moi, est-ce que je vivrais ça un jour ? Qu’est-ce que j’ai raté au juste, pour vivre ce que je vis aujourd’hui ? Où est-ce que je me suis trompée ?

Parfois je me dis que c’est juste moi, je suis lente, j’arrive après tout le monde : à l’école, je devais travailler plus pour avoir un niveau moyen, et essayer vainement de rattraper les autres. Je me suis toujours demandé pourquoi certains y arrivait sans travailler, alors que moi j’étais à la traine en travaillant plus que les autres.
Toutes mes amies et collègues ont eu le concours, je suis la dernière à rempiler, encore. En 2019, je le passerai pour la 3e fois.
Parfois je comprends vite. Et parfois je suis la dernière.
J’ai dû interrompre mes études, parce que je n’avais pas les moyens de suivre des cours et travailler en même temps. Pourquoi moi j'ai dû bosser, galérer, puis arrêter, et ne même pas faire les études que je souhaitais ? J’ai mis longtemps à trouver ma voie – et je l’ai trouvé un peu par hasard.
Est-ce que je suis malheureuse aujourd’hui ? Non, je suis contente et fière de tout ce que j’ai accompli, surtout avec les cartes qui m’ont été distribuées.
Je pense être une personne pas trop dégueulasse, une fille respectable, une femme qui a su tirer son épingle du jeu.
J’ai des amis qui croient en ma valeur, j’ai des amis de très longues dates, j’ai des amis fidèles et des amitiés précieuses. Ce qu'on pourrait appeler "des vrais amis". 
J’en déduits que je ne suis pas un monstre.

Alors pourquoi suis-je seule ? Pourquoi je n’ai pas d’amour dans ma vie, pourquoi je n’ai pas de relation sentimentale qui fonctionne ?
Je regarde autour de moi, et je vois des couples partout. Qu’importe que les gens soient méchants ou insupportables, qu’ils aient des psychoses ou qu’ils soient des cas sociaux, qu’ils soient sales ou repoussants, ils arrivent à trouver un partenaire.
L’amour semble faire tourner le monde.
Et pourtant, il m’est refusé.
Certes, il y a aussi des couples qui ne fonctionnent pas. Des gens qui restent ensembles par habitude, ou par peur d’être seuls. Bien sûr, je ne cherche pas quelqu’un pour boucher un trou, juste pour pouvoir dire « Je ne suis pas seule ». Non, j’espère trouver une relation entière, équitable, où le partage est le maître mot. Une relation qui a du sens.
Qu’est-ce que j’ai loupé ?
Ma peur aujourd’hui, c’est que j’ai trente ans. Que les hommes de mon âge sont déjà en couple, ou ont déjà des enfants. Que le « choix » se restreint. Je n’ai pas envie de choisir un partenaire comme on choisit la personne avec qui on part en fin de soirée : la moins pire parmi ceux qui restent, ceux qui n’ont pas été choisis au départ.
Est-ce que je suis une laissé-pour-compte moi aussi ? Un thon de fin de soirée que quelqu’un n’embarquera que par dépit ?
Est-ce que ma vie serait plus réussie si j’habitais ailleurs ? Si j’avais fait d’autres choix ? A quel point je suis responsable de ma vie sentimentale désastreuse ? Est-ce que tous ces échecs ne font pas que m’éloigner d’avantage d’une relation ?
J’ai peur de ne plus avoir le temps. J’ai peur de rencontrer quelqu’un trop tard pour mener une existence « Normale » comme je l’ai rêvé. Oui, je souhaite une vie normale qui m’a toujours été refusée. Moi la végétarienne, dont le père est partie à la naissance pour aller se mettre en couple avec un mec « En fait j’étais homo. On divorce ? », dont le père adoptif sénégalais (et trente ans plus âgés que ma mère) déchaînais le racisme dans ma famille et dans mon école privé catho. Moi qui ai été viré de la maison à 18 ans, et qui ai assisté, impuissante, aux crises à la maison, à mon beau-père qui devenait violent, à ma mère qui a dû fuir, et déménager plusieurs foi pour lui échapper. Moi qui suis partie à la recherche de mon père à 20 ans, pour retrouver un homme qui finalement n’en avait rien à foutre de moi « J’aurais préféré que tu fasses Médecine ou Droit ». Moi qui ai eu une confiance brisée par un oncle violent, et une puberté tordue suite à des attouchements sexuels. Moi qui aujourd’hui ne connais que ma famille maternelle, qui se résume finalement à une petite dizaine de personnes.
Pour contrebalancer, moi je voulais une famille « classique » et unie : Rencontrer quelqu’un, me marier peut-être, avoir des enfants, une maison, une balançoire dans le jardin, et faire des cabanes entre deux chaises. Manger le soir en famille, se raconter nos journées, partir en vacances en familles. Tout ce que je n’ai jamais vécu.
A la place, je me suis installé avec un mec qui me piquait du fric, je suis tombée folle amoureuse d'un homme en prison, j'ai couru après un mec qui me traitait comme une prostituée et qui me baisait comme tel, je suis tombée amoureuse des dizaines de fois, et puis il y a eu le mec-de-la-salle-de-sport, et puis Hector et ses colères, et quand enfin je croyais tomber sur un mec correct, et que je laissais tomber toutes mes barrières, je me suis cassé la gueule puissance mille. Avec en prime ses justifications vaseuses qui ont accentuées mon sentiments d'être à côté de la plaque. 
Au temps pour mes envies de normalité... 
Mister Perfect, impitoyable, m’a assené « Mais ton histoire n’est pas normale, et tu n’es pas normale toi non plus, il faut t’y faire ! Et c’est ta richesse tu sais ! ».
Ma richesse ? Si cette richesse me laisse seule, alors à quoi ça sert ?

Je ne comprends pas mon histoire, je ne comprends pas mon destin. Je ne sais pas qui je suis, je ne sais pas ce que j’ai loupé, je ne sais pas ce que j’aurais pu faire de plus.
Je ne sais pas pourquoi moi, je n’ai pas la même vie que les autres.
Et je me demande si je peux être heureuse avec ça.


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