vendredi 9 mars 2018

Le week-end où j'ai posé (et mangé) le parquet

J'ai reçu le parquet bien plus tard que prévu, mais comme tout était en retard, et que finalement j'ai pu habiter chez moi plus tôt que prévu, je suppose qu'on peut dire "C'est pas si pire".


De fait, la familia (enfin : Papy, Mamie, Maman, et le frangin - même si celui-ci n'a rien fichu du week-end, qu'à rester au lit avec sa console portable. Oui, mon frère est un ado) a déboulé pour avancer les travaux, et surtout pour poser le parquet.
Moi j'étais ultra confiante quant à mes capacités à poser le parquet après mon cours d'apprentissage. Pour moi ça prendrait une journée grand maxi, les doigts dans le nez. Surtout que j'avais acheté de la putain de grande marque à un prix indécent au mètre carré, qu'on m'a vendu comme étant extraordinaire, et d'une facilité déconcertante à poser.
Bref, la Familia déboulait le vendredi soir jusqu'au lundi matin. 
Je me disais, bouffie d'optimisme, qu'on poserait le sol, qu'on finirait les murs, qu'on ajouterait des prises électriques, et qu'on poserait ma cuisine, que j'avais reçu le même jour que le parquet.

Genre à l'aise quoi, le fond sonore Jazzy en option et le coucher de soleil en arrière plan.

Evidemment, ça ne s'est absolument pas passé comme ça.


Le vendredi, on a noté les prises de courant à mettre et à enlever, ce qui a provoqué quelques engueulades et crises de larmes de ma part. Car oui, pour situer, ça faisait 5 jours que j'avais appris que Charles-Henri s'était copieusement foutu de ma gueule, je n'étais pas au top de ma forme, mon papy est parfois un peu brusque, j'avais arrêté les médocs depuis 4 jours , et je ne le savais pas encore mais j'allais avoir mes règles. 

Conclusion : mon émotivité crevait le plafond.
On a fini par tomber d'accord, mon papy s'étant radoucit lorsque j'avais fini par gueuler : "Ecoute, laisse tomber, je vais appeler un électricien, ça tombe bien, il y en a un au bout de la rue. En plus j'ai couché avec son fils pendant 4 mois, alors on n'est plus à ça près !" [oui, c'est le père du mec-de-la-salle-de-sport. Oui.]

Le samedi, j'ai voulu finir de poncer mes murs. J'avais déjà grillé une ponceuse (celle de mon collègue), et j'ai continué avec celle de mon papy. J'ai bousillé un nombre incalculable de papier abrasifs, avant que mon papy ose me dire "Tu devrais appuyer beaucoup moins fort tu sais, il suffit juste de passer doucement sur le mur...".
Ok, peut-être que je laissais un peu vagabonder mon esprit et peut-être que j'imaginais la tronche à Charles-Henri sous ma ponceuse. Et peut-être que j'appuyais de tout mon poids dessus.
J'ai donc fini de poncer mes murs, constatant qu'en effet, ça marchait mieux quand je n'appuyais pas comme un âne dessus. Et puis on s'est mis à poser le parquet.
Ce putain de saloperie de merde de parquet de mes couilles.
Qui ne se clipsait pas du tout,à tel point qu'au bout de 2h, on s'est dit qu'on allait appeler cette putain de boutique locale où je l'avais acheté (moi et mes lubies de Bobo, bordel...) et leur dire de nous expliquer, parce que clairement, on n'avait pas compris.
Mais la boutique était fermé, le samedi c'est 17h s'teuplait.
On s'est acharné.
On a vaguement trouvé qu'en tapant furieusement au marteau dessus, on arrivait à assembler les lattes. 
Certes, ça faisait bien souvent sauter les autres lattes, à l'autre bout de la pièce.
Donc nous devenions cinglés.
Pendant ce temps, ma grand-mère était debout derrière nous, et répétait "J'ai jamais vu un parquet aussi difficile à poser".
Donc nous devenions encore plus cinglés.
Dimanche, dès 10h du matin, on s'est remis à la pose du parquet.
Vers le début d'après-midi, on avait avancé d'un misérable tiers.
Ma mamie avait répété 494 fois "J'ai jamais vu un parquet aussi difficile à poser", moi j'avais mes règles depuis la veille, j'avais mal au ventre et au dos, j'étais trop sale pour pouvoir aller me changer, et je sentais le sang imbiber tranquillement mes sous-vêtements. Bref, j'étais au bout de ma vie.
Je suis montée à l'étage chercher je-ne-sais-quel outil, j'étais agacée, j'avais mal, j'en avais plein le cul, moralement et physiquement.
C'est donc pile à ce moment là que mon pied à glissé sur la fine poussière du poncage qui recouvrait mes marches, et que j'ai dévalée une partie de l'escalier sur le dos. J'ai voulu me rattraper, je me suis ratée, j'ai donc dévalée l'autre partie de l'escalier sur le ventre. Je me suis ensuite lamentablement échouée au milieu de ma cuisine, arrachant dans ma chute toutes les baches que j'avais mis des heures à poser. Mon pied a fait un demi-tour, et ma mamie a hurlé "Ta cheville !".
Et là, je me suis dit "Dans aucun putain de mondes je n'ai pu me fouler la cheville alors que je viens seulement de reprendre le sport. C'est juste hors de question".
Sauf que j'avais vraiment mal à la cheville.
Et un peu partout, c'est vrai.
Ma mamie m'a appliqué un produit très odorant et très vert (?!) dont elle a le secret, et j'ai continué à me dire que de toute façon, c'était hors de question que je me soit vraiment fait mal. Impossible.
J'ai continué à poser le parquet avec mon papy, j'ai continué à avoir mal partout, j'ai continué à saigner, et on a continué d'en chier avec ce parquet incroyablement cher et relou à poser, pendant que ma mamie continuait de dire "J'ai jamais vu un parquet aussi difficile à poser".
Elle disait aussi : "Fais attention à ta cheville hein"
Et puis : "Elle se débrouille bien, on dirait qu'elle a fait ça toute sa vie !"
Avant d'ajouter "Mais quand même, c'est incroyable ce parquet, j'ai jamais vu ça !"

On a arrêté le dimanche à 20h, on n'avait pas fini de poser le parquet, on n'avait pas posé de plintes, on n'avait pas du tout commencé à poser la cuisine non plus.

Bref, c'était pas du tout ce que j'esperais.
J'ai été me doucher, j'ai flippé à mort en voyant ma cheville "Nom de Dieu ! Elle est toute verte !"... avant de me rappeler que c'était le produit chelou que m'avait appliqué ma mamie.
A priori, c'était ni enflé, ni bleu.

Le lundi matin, à 7h, j'ai regardé avec appréhension ma cheville, et j'ai eu le soulagement infini de la découvrir "normale". Un peu douloureuse peut-être, un peu sensible, mais rien d'extraordinaire.

A 8h on recommençait à poser le parquet. On commencait à en avoir sérieusement ras le bol, surtout qu'il restait des découpes vraiment merdiques à faire. On s'est pris la tête avec mon papy, qui voulait que je tape sur une latte mais je ne comprenais pas pourquoi, il m'a dit "Tape et c'est tout !", j'étais donc très très très énervée, j'ai tapée rageusement, et j'ai éclaté la latte. Ça a calmé tout le monde, on s'est dit qu'il fallait qu'on communique un peu mieux, on a pris une latte neuve, et on a continué.

Vers midi, on a fini de poser le parquet.

Pas les plintes.
Ni les seuils.
Juste le parquet.
Bordel, quelle désillusion ! Moi qui pensait avoir une cuisine finie et fonctionnelle à la fin du week-end !! J'allais donc continuer à "cuisiner" dans mon chiotte pendant une durée indéterminée.
Ma grand mère avait dit 892 fois : "J'ai jamais vu un parquet aussi difficile à poser".
910 fois : "Tu vas voir, ça va te changer complètement la pièce ! Tu vas voir !"
736 fois : "Elle se débrouille bien, on dirait qu'elle a fait ça toute sa vie !"
541 fois : "Il pleut encore"
458 fois : "L'élève va dépasser le maître !"
312 fois : "C'est quand même incroyable, ce parquet".
357 fois : "L'eau monte !" [J'ai appris par ma voisine que nous étions dans une zone inondable. Surprise !!! C'était écrit nulle part dans le dossier immobilier !]
235 fois : "Ouh, j'ai mal aux genoux, je vais me mettre de la crème !" (et là tu es à bout et tu as un putain de fou rire nerveux, parce qu'à part être debout à dire des conneries, pendant que toi tu es à genoux à galérer, elle n'a rien branlé, et que c'est toi qui aurait besoin de cette foutue crème, même si elle est verte et qu'elle pue la mort)

Ensuite j'ai regardé le résultat.

Certes, il pleuvait encore, la lumière était triste (de toute façon, j'ai jamais vu le soleil depuis que je suis dans cette maison, je ne sais même pas comment elle est exposée), mais... Quand même.
C'était putain de beau, clair, et lumineux.
Et c'était moi qui l'avait posé, aidé de mon papy, avec qui je n'avais jamais rien fait de ma vie (notre histoire familiale est compliquée).
Je me suis dit que ça serait finalement comme le reste : Un petit pas après l'autre.
Et en plus, c'est chez moi.


Avant
Après
                     

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